En 2023, le revenu salarial des femmes est encore inférieur de 22% à celui des hommes
Selon les dernières données publiées par l’Insee, en 2023, le revenu salarial des femmes est encore inférieur de 22,2% à celui des hommes. Deux facteurs expliquent l’essentiel de cet écart : le temps de travail et la structure des emplois.
En effet, 80% des emplois à temps partiels sont aujourd’hui encore occupés par des femmes, ces dernières étant surreprésentées sur des métiers à temps partiel (temps partiel subi) mais aussi sont toujours contraintes de suspendre leur carrière ou de réduire leur temps de travail pour prendre en charge l’éducation des enfants.
Si on neutralise les différences de temps de travail, l’écart de salaire en équivalent temps plein (EQTP) est encore de 14,2%. Ce qui joue ici est lié à la « ségrégation professionnelle », soit la surreprésentation des femmes dans les métiers et postes les moins bien rémunérés. Ainsi, les ¾ des postes d’employés sont occupés par des femmes mais seulement 38% des postes de cadres. Par ailleurs, 39 % des salariées sont concentrées sur vingt professions (secrétaires, employés services comptables, employées administratives, nettoyeuses, etc.), alors que ce n’est le cas que pour 30% des hommes.
A temps de travail et à poste équivalent, les écarts de salaire sont moindres, tout en restant significatifs : -3,8% en 2023 dans le secteur privé.
Les écarts de salaire tendent à se réduire
Les écarts de salaire se réduisent cependant lentement mais surement : en 20 ans l’écart de revenu salarial (influencé par le temps de travail) s’est réduit de plus de 11 points, et l’écart de salaire EQTP s’est réduit de -7,4 points, sous l’effet d’une hausse du volume du travail des femmes et d’une évolution de la composition des emplois (la part des femmes parmi les cadres du secteur privé, est passée de 23 % en 1995 à 38 % en 2023).
Les écarts de salaire à poste et à temps de travail équivalent ont pratiquement été divisés par deux en 20 ans (6,8% en 2003 et -3,8% en 2023). Mais ces moyennes nationales masquent évidemment des situations disparates selon les entreprises.
L’égalité professionnelle, enjeu incontournable des consultations et négociations au niveau de l’entreprise
Au niveau des entreprises, la dynamique de réduction des écarts de salaire a été portée par l’obligation pour l’employeur de fournir des informations sur l’égalité professionnelle (Rapport de situation comparée, BDESE, Index de l’égalité professionnelle) mais aussi de l’obligation de négocier sur ce thème, dans les entreprises pourvues de délégués syndicaux :
- Tous les ans (ou par accord tous les 2 ou 3 ans) la négociation sur la rémunération, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée doit aussi porter sur le suivi de la mise en œuvre des mesures visant à supprimer les écarts de rémunération et les différences de déroulement de carrière entre les femmes et les hommes.
- La négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail doit également porter sur les objectifs et les mesures permettant d’atteindre l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment en matière de suppression des écarts de rémunération, d’accès à l’emploi, de formation professionnelle, de déroulement de carrière et de promotion professionnelle, de conditions de travail et d’emploi, en particulier pour les salariés à temps partiel, et de mixité des emplois.
Par ailleurs, lorsque les résultats obtenus par l’entreprise à l’Index de l’égalité Femmes-Hommes au regard des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes et aux actions mises en œuvre pour les supprimer, se situent en deçà du niveau de 75 points, la négociation sur l’égalité professionnelle doit également porter sur les mesures adéquates et pertinentes de correction et, le cas échéant, sur la programmation, annuelle ou pluriannuelle, de mesures financières de rattrapage salarial. En l’absence d’accord prévoyant de telles mesures, celles-ci doivent être déterminées par décision de l’employeur, après consultation du CSE.
La transposition de la directive européenne sur la transparence salariale pourrait relancer la dynamique de résorptions des écarts dans les entreprises
Le gouvernement a (enfin) annoncé pour septembre 2025, un projet de loi permettant la transposition de la directive européenne n°2023/970 du 10 mai 2023 sur la transparence salariale qui renforce, pour les entreprises de plus de 100 salariés, l’obligation d’information de l’employeur sur les rémunérations. Le projet de loi doit être précédé d’un d’un cycle de concertations avec les partenaires sociaux.
La directive sur la transparence salariale est porteuse d’améliorations en créant de nouvelles obligations d’information pour l’employeur :
- Obligation pour l’employeur de fournir aux candidats à un emploi, des informations sur la rémunération initiale ou la fourchette de rémunération initiale, sur la base de critères objectifs non sexistes. Interdiction de demander au candidat la rémunération perçue à son poste actuel ou à ses postes passés ;
- Obligation, de mettre à disposition des salariés, les critères de fixation de la rémunération, les niveaux de rémunération et la progression de rémunération ;
- Obligation de l’employeur de transmettre au salarié qui le demande, par écrit et dans un délai de 2 mois, des informations sur son niveau de rémunération individuel et sur les niveaux de rémunération moyens, ventilés par sexe, pour les catégories de travailleurs accomplissant le même travail que lui ou un travail de même valeur que le sien.
- Obligation pour l’employeur de faire connaître aux salariés, tous les ans, leur droit d’information sur la rémunération ;
La transposition de la directive devrait se traduire par une réforme de l’index égalité professionnelle (les cinq indicateurs actuels seraient ainsi remplacés par les sept figurant dans la directive).
Il faudra bien entendu attendre le projet de loi pour connaître les dispositions définitives. Toujours est-il que la transposition de la directive pourrait relancer la dynamique de réduction des écarts de salaire par les entreprises, même si l’impératif de l’égalité professionnelle ne se limite pas à une question de transparence des rémunérations, mais doit également agir sur les autres facteurs structurels (parcours scolaires, répartition des tâches domestiques, éducation des enfants, déterminants genrés des critères de classification des emplois, etc.) qui génèrent les inégalités salariales.