Dans le cadre d’un projet de réorganisation, la filiale du groupe pharmaceutique Sanofi a prévu la suppression de 325 emplois dans ses différents établissements. Ce projet étant susceptible d’entraîner des licenciements pour motif économique, notamment pour les salariés qui ne seraient pas affectés sur un autre emploi, un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) a été élaboré.
Faute d’accord obtenu avec les syndicats, une décision unilatérale de l’employeur fixant le contenu du PSE a été soumise à l’administration du travail. Le 13 novembre 2024, cette dernière a décidé d’homologuer le projet de l’employeur.
Deux CSE d’établissement et le CSE central, représentés par Maître Elsa GALAUP de JDS avocats, ont contesté cette décision invoquant notamment le fait que les critères d’ordre fixés par le PSE étaient illicites.
Les critères d’ordre des licenciements pour motif économique
En l’absence d’accord collectif applicable, lorsqu’un employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du voire des CSE (art. L. 1233-5 al.1 CT).
Ces critères doivent nécessairement prendre en compte les charges de famille, en particulier celles de parents isolés ; l’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ; la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ; les qualités professionnelles appréciées par catégorie (art. L. 1233-5 al.2 CT). En pratique, l’employeur doit affecter des points à chacun de ces critères pour classer et identifier de manière objective les salariés qui seront visés par une mesure de licenciement.
Il faut rappeler que si l’employeur peut privilégier un de ces critères, c’est à la condition de tenir compte de l’ensemble des autres critères prévus par le Code du travail (art. L. 1233-5 al.3 CT).
Il incombe ensuite à l’administration du travail, lorsqu’elle est saisie d’une demande d’homologation d’un document unilatéral portant PSE, de contrôler la légalité de ces critères. Toute contestation relative à la décision d’homologation peut être portée par le CSE devant le tribunal administratif, comme c’est le cas dans cette affaire.
L’illégalité du critère des qualités professionnelles et du critère relatif aux charges de famille dans le PSE Sanofi Aventis R&D
En l’espèce, le tribunal a annulé la décision d’homologation en estimant que le classement par points prévu par le PSE pour fixer l’ordre des licenciements était illégal à un double titre.
S’agissant du critère des qualités professionnelles, le tribunal a considéré que l’attribution par l’employeur de 2 points seulement aux salariés n’ayant pas fait l’objet d’une évaluation professionnelle, contre une attribution pouvant aller jusqu’à 30 points pour ceux ayant bénéficié d’une évaluation, pénalisait sans justification objective les premiers salariés.
S’agissant du critère relatif aux charges de famille, le tribunal a estimé que le choix d’attribuer 50 points aux seuls salariés ayant la qualité de parent isolé ou ayant à leur charge une personne en situation de handicap implique une différence de traitement avec les autres salariés dont l’ampleur n’est pas justifiée, le plan ne prévoyant l’attribution d’aucun point dans les autres situations.
Le jugement rendu par le tribunal administratif ayant prononcé la nullité de la décision d’homologation prise par l’administration du travail, le PSE est annulé.
TA MELUN, 1er avril 2025, n°2500496