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L’évolution salariale des représentants du personnel

Nouvelles précisions pour la garantie d’évolution salariale des représentants du personnel

Consacrée par la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, la garantie d’évolution de la rémunération permet à certains représentants du personnel de ne pas être pénalisés en matière d’augmentation de salaires par rapport à leurs collègues non investis de mandats électifs ou syndicaux (art. L. 2141-5-1 CT).

Un mécanisme complexe à appréhender

Sauf accord collectif au moins aussi favorable, les représentants du personnel (notamment les membres élus du CSE, les représentants syndicaux au CSE et les délégués syndicaux) bénéficient sur l’ensemble de la durée de leur mandat d’une évolution de rémunération au moins égale aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant cette période par les salariés de l’entreprise (art. L. 2141-5-1 CT).

Pour que ce mécanisme s’applique, les représentants du personnel doivent disposer d’un nombre d’heures de délégation sur l’année dépassant 30 % de la durée de travail qui est fixée dans leur contrat de travail ou, à défaut, de la durée applicable dans l’établissement.  Concrètement, pour un salarié à temps complet soumis à la durée légale hebdomadaire du travail (35 heures/semaine soit 1607 heures /an), il faut cumuler au moins 40 heures de délégation par mois (heures auxquelles ont droit les représentants, et non pas celles prises de manière effective).

La situation du représentant du personnel doit ensuite être précisément comparée avec les salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l’ancienneté est comparable. Lorsque cette comparaison est impossible, la garantie d’évolution salariale est au moins égale aux augmentations générales, et à la moyenne des augmentations individuelles perçues dans toute l’entreprise (art. L. 2141-5-1 CT).

Dès 2023, la Cour de cassation avait apporté une première précision importante quant aux modalités d’application de cette garantie. Elle avait ainsi précisé que les salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l’ancienneté est comparable sont ceux qui relèvent du même coefficient dans la classification applicable à l’entreprise pour le même type d’emploi, engagés à une date voisine ou dans la même période. Elle avait en outre rappelé que la comparaison devait être effectuée chaque année et non pas à l’issue du mandat (Soc. 20 décembre 2023, n° 22-11.676).

Par une décision du 22 janvier 2025, la Cour de cassation apporte de nouvelles précisions sur la méthode de calcul de la garantie, en l’absence de salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l’ancienneté est comparable.

La prise en compte des augmentations individuelles liées à une promotion dans la détermination de la garantie d’évolution salariale

Dans cette affaire, la Cour de cassation devait déterminer si, en l’absence de salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l’ancienneté est comparable, la moyenne des augmentations individuelles perçues dans l’entreprise devait prendre en compte, ou non, les augmentations individuelles résultant d’une promotion professionnelle entraînant un changement de catégorie professionnelle, solution retenue par la Cour d’appel.

Parmi les arguments invoqués à l’appui de son pourvoi, l’employeur estimait que la moyenne des augmentations individuelles devait tenir compte uniquement des augmentations de salaire à qualification identique, et non des augmentations de salaire consécutives à une promotion professionnelle, la garantie instituée par la loi n’ayant que pour objet d’assurer aux représentants du personnel une évolution salariale et non une évolution professionnelle.

La Cour de cassation rejette le pourvoi de l’employeur et précise qu’en l’absence de tout salarié relevant de la même catégorie professionnelle, l’évolution de la rémunération du salarié doit être déterminée par référence aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues dans l’entreprise, y compris lorsque certaines augmentations individuelles résultent d’une promotion entraînant un changement de catégorie professionnelle.

L’utilisation des documents des NAO comme base de référence objective

Autre apport de cette décision, la Cour de cassation approuve l’utilisation des documents des négociations annuelles obligatoires pour déterminer le montant de la garantie d’évolution salariale, dans la mesure où ils offrent une base de référence objective qui, pour l’ensemble du personnel, permet de déterminer une augmentation générale pour une année et que les documents des négociations annuelles obligatoires présentent un degré de pertinence objectif.

Maître Elsa Galaup, avocate associée du cabinet JDS avocats et en charge du dossier devant la cour d’appel, résume la décision : « Il s’agit d’une solution pragmatique rendue par la Cour de cassation. Dorénavant, les représentants du personnel éligibles au dispositif sont fondés à réclamer chaque année une augmentation de salaire égale au taux moyen d’augmentation des salaires communiqué aux organisations syndicales lors des NAO, tout en prenant en compte les augmentations accordées aux salariés de l’entreprise en raison d’une promotion ».

Cass. soc., 22 janvier 2025, n° 23-20.466

    Jean-Baptiste Merlateau

    Avocat associé Responsable de la formation

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